Et si on parlait de « slow jewelry » ? #1

Et si on parlait de « slow jewelry » ? #1

Suite à l’article d’il y a quelques semaines sur le changement de rythme opéré pour Desidero, je voudrais revenir sur une problématique plus large et en partie liée à ce sujet.

Vous avez déjà entendu parler de fast fashion ? Et de son opposé la slow fashion ? Oui je sais, le sujet a déjà été largement traité, commenté, dans la presse (devenue légèrement schizophrène d’ailleurs) et surtout sur les réseaux sociaux et beaucoup de blogueuses/influençeuses/youtubeuses ont eu des prises de conscience et c’est finalement devenu un sujet très abordé. C’est en fait une problématique qui ne se limite pas à l’industrie textile, à mon avis.

Privilégier les petits créateurs plutôt que les entreprises du mass market, privilégier la fabrication française plutôt que l’importation depuis l’autre bout du monde, privilégier les fabrications en petites séries plutôt que de croiser x personnes avec la même pièce que vous, s’interroger sur la qualité des matières et les conditions de production. On entend parler de ses questions (et beaucoup d’autres) principalement au sujet de l’industrie textile mais elles sont valables également dans la bijouterie. Avant, à peine 2 générations avant la mienne, l’achat d’un bijou était pour la plupart des gens, un réel investissement qui marquait une occasion spéciale. C’était un bijou qu’on avait à cœur de transmettre aux générations futures, et qui avait du sens. Aujourd’hui, pour aller avec une nouvelle robe, on craque pour tel collier ou paire de boucles d’oreilles au prix parfois ridiculement bas, fabriqué le plus souvent dans des pays où le prix de la main d’oeuvre est bien en dessous de celui de la France (alors qu’on est encore parfois sur un produit à très forte valeur ajoutée) et/ou dans des matières non précieuses qui ne dureront que le temps d’un déjeuner de soleil.

Les conditions de fabrication ne sont pas toujours claires, voire trompeuses, et la plupart des consommateurs ne savent pas faire la différence entre un bijou de qualité et de la pacotille. En effet, le prix n’est pas toujours un bon moyen de se faire une idée. D’ailleurs si le sujet vous intéresse, je vous invite à (re)lire mon article Tout ce qui brille n’est pas d’or… J’y parle surtout de finition, d’appellation, de réglementation, notamment dans la bijouterie, la fantaisie ou même haute fantaisie; le plaqué or, le vermeil, le doré à l’or fin et toutes les autres dénominations non officielles que l’on peut trouver sur le marché.

Encore une fois, mon propos ici n’est clairement pas moralisateur. Comme je le disais dans l’article que je vous cite juste avant, le principal pour moi est que vous fassiez vos achats en toute conscience, que vous achetiez de la pacotille, qui en met plein la vue à un prix ridiculement bas ou au contraire que vous craquiez sur cette it pièce à un prix exorbitant, faites-le en ayant conscience de la qualité que vous achetez, in fine. Et surtout ne comparez pas uniquement les prix sans vous penchez sur les conditions et lieux de fabrication, la qualité du SAV (ça peut servir), et l’originalité des pièces. Pour l’anecdote, je vois en ce moment revenir sur Instagram des modèles identiques de bagues ou bracelets présentés sur des comptes de marques différentes… Des marques au marketing bien ficelé, qui vous vendent une histoire de famille par ici, des voyages inspirants par-là, etc. Étonnant non ?

Alors, vous allez me dire, quid de mes propres créations ??

Avant de vous écrire cet article, j’ai pris le temps de discuter avec Eloïse Moigno et Thomas Ebélé, co-fondateurs de SloWeAre. La comparaison avec l’industrie textile qui est au cœur de leur expertise me semblait un bon moyen d’évaluer ma propre production.

Je ne vais pas aborder ici tous les aspects à prendre en compte et dont j’ai discuté avec eux, (comme la provenance des matières premières et leur condition de production par exemple) pour la simple et bonne raison que je n’ai pas encore toutes les réponses. Cela fera l’objet d’un deuxième article. Je vous parlerai donc avant tout de mes conditions de fabrication, et de tout ce qui concerne les fondements de la marque. Vous les connaissez en grande partie mais j’en profite pour revenir dessus pour ceux qui ne me connaissent pas.

Desidero - boutique et atelier 1

Vous pouvez passer en boutique pour le constater par vous-même, mais si vous ne le savez pas encore je fabrique moi-même toutes mes créations. Certains modèles ont nécessité l’aide d’artisans plus spécialisés que moi (voir mon article sur la collection Désirée) et je travaille aussi avec des prestataires pour la fonte des cires (voir mon article sur le travail de la cire) ou encore la dorure des pièces en vermeil. Tous ces professionnels sont à Paris et je fais régulièrement le tour de la capitale le matin pour passer les voir avant d’ouvrir la boutique.

Mes pièces sont éditées en petites séries, voire en éditions limitées ou en pièces uniques. C’est un travail à échelle humaine et non industrielle. Je découpe mes plaques, je fais mes propres soudures et fabrique mes propres prototypes en cire lorsque cette méthode est la plus appropriée. Être l’artisan qui travaille chacune des pièces a une vraie importance pour moi. C’est d’ailleurs ce qui m’a poussé il y a presque 8 ans à démarrer ma formation en CAP. Je voulais pouvoir maîtriser toutes les étapes de fabrication pour créer moi-même les pièces que j’avais imaginées, sans être dépendante du travail des autres ou me contenter simplement d’assembler des pièces détachées.

Je pratique des prix qui sont les plus justes possible. J’ai tenté il y a presque 2 ans le salon Bijorhca (salon professionnel de bijouterie) dans l’optique de distribuer mes créations dans d’autres boutiques pour faire connaître mon travail. Mais je me suis vite aperçu que cette option n’était pas pour moi. Les revendeurs cherchent avant tout à s’assurer une marge confortable quand moi j’essaye de vendre la qualité du travail artisanal et l’originalité de mes pièces. Je comprends évidemment qu’ils ont des contraintes financières à respecter mais cette démarche ne permet pas de vendre des produits de qualité, fabriqué en France à un prix qui ne soit pas ridiculement élevé (ou alors je ne gagnerais pas ma vie et je suis au regret de vous dire que je ne vis pas encore seulement d’amour et d’eau fraîche). Aujourd’hui je choisis donc consciencieusement les boutiques ou marketplaces où je décide de proposer mes pièces, et je travaille avec des personnes qui ont à cœur de proposer des pièces originales et qui en connaissent les contraintes.

Et pour finir, comme je vous le disais dans l’article cité au début de celui-ci, je viens également de décider de ralentir ma production de nouvelles collections pour laisser plus de place à la fabrication sur-mesure et aux ateliers d’initiation. Je vous laisse ainsi le temps de découvrir chaque nouvelle collection et je laisse plus de temps à l’humain, tant d’un point de vu professionnel que personnel. Après tout c’est le plaisir de partager avec vous qui m’a conduite là où je suis.

Desidero le blog - Atelier Wecandoo - Démonstration
Atelier Wecandoo – démonstration (photo Wecandoo)
Desidero le blog - Atelier Wecandoo - Transmission des gestes
Atelier Wecandoo – Transmission (photo Wecandoo)

Et du coup, quid de ma propre consommation ??

Comme je vous le disais en début d’article, quel que soit la pièce que vous achetez, faites-le en toute conscience. Je ne vous jetterai pas la pierre si vous craquez chez Zara ou H&M. Moi aussi je me dirige vers ce genre d’enseignes pour un petit craquage fringue sans conséquence sur mon budget. Mais là où je ne me considère pas comme une victime de la fast fashion, c’est que je n’y vais pas tous les 4 matins, que je prends soin de mes vêtements, et que je les garde et les porte longtemps. Ma consommation n’est certes pas sans défaut mais aujourd’hui j’ai l’envie de me diriger vers des marques plus éthiques pour aller vers des matières plus respectueuses de l’environnement et des conditions de production qui respectent l’humain et sa santé. Un pas après l’autre 😉 Il est évident que les problématiques que j’ai en tant que créatrice ont tendance à faire changer ma façon de consommer de façon générale.

Je m’arrête là pour aujourd’hui (enfin), et j’espère que vous me pardonnerez cet article fleuve. Tous les sujets abordés me tiennent de plus en plus à cœur et une fois lancée, on ne m’arrête plus. Si vous avez des questions ou des remarques je serai ravie de les lire et d’y répondre. Je suis ouverte à la discussion et comme vous l’aurez peut-être compris je ne souhaite pas tomber dans l’excès, ni dans un sens, ni dans l’autre. Je ne juge pas mais souhaite plutôt être transparente avec vous et vous inviter à vous poser les bonnes questions quand vous achetez.

J’espère que la suite de cet article viendra bientôt, et je vous dis à très vite pour toujours plus d’aventures.

Giulia

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